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Le Concordat d'Alsace-Moselle

16 Jan

2013

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Écrit Par  Yann Bidon
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Le Concordat d'Alsace-Moselle

Aujourd’hui, on va parler de la laïcité de l’État. J’imagine que vous savez que l’État est laïc. Cela signifie qu’il y a une séparation entre l’Église et l’État, l’État devant rester neutre. Ainsi ce dernier n’a plus de religion officiel reléguant cela à la sphère privée et donc de la pensée propre à chacun. Puisque il est libre aux personnes de choisir leur religion (ou d’être athée), toutes les religions sont acceptées sur le territoire français et l’État défend la liberté de culte.

C’est dès 1905 avec la loi sur la séparation de l’Église et de l’État que cela a commencé. L’article 1 de la loi du 9 décembre 1905 prévoit que «La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public ». Cependant, avant même la séparation de l’Église et de l’État, ce dernier respectait la liberté de culte en témoigne l’article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : «Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi». Enfin, elle est présente dès le premier article de notre Constitution, au plus haut niveau de droit donc, «La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances».

Force est de constater que la laïcité est une valeur forte, défendue de longues dates, sur toute la France. Toute ? Non ! Car un village peuplé d'irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l'envahisseur. Non, je m’égare là :D . Je voulais dire qu’il existe un territoire sur lequel la séparation de l’Église et de l’État n'est pas effectifve. Il y a évidemment certains lieux d’outre-mer mais j’en reparlerai sans doute dans un autre article, je parle bien de la France métropolitaine. C’est l’Alsace et la Moselle.

En effet, en 1905, lors de la séparation, l’Alsace-Moselle était allemande. La loi française ne s’y appliquait pas. À la sortie de la première Guerre Mondiale, nous avons récupéré ces territoires. On a ensuite fait une mise en conformité avec la loi française avec la loi du 1 juin 1924 mais l’article 7 annonce qu’est conservé «la législation locale sur les cultes et les congrégations religieuses». Fort bien mais qu’elle est donc cette législation ?

Il faut remonter en 1801. Napoléon Bonaparte, premier Consul de la République et préparant son Empire, était soucieux de contrôler la religion. Il fît alors un Concordat, c’est-à-dire, un accord entre un État et le Saint Siège, où l’État se charge de rémunérer les ministres du culte, en échange l’État nomme ses évêques. Je parle bien ici uniquement de leur nomination, on verra un peu plus loin, ce que cela signifie. La construction des bâtiments, leurs rénovations, etc. reste le problème des fidèles.

Ce Concordat n’a point été enlevé par les allemands et ainsi l’article 7 de la loi 1924 énonce la conservation de ce dernier. Le conseil d’État réaffirma l’application du Concordat en Alsace-Moselle le 24 janvier 1925. Et nous ne l’avons toujours pas enlevé. De ce fait, il est toujours en vigueur.

Mais concrètement, ça change quoi ? L’Église n’étant plus distincte de l’État, les ministres du culte (prêtes/pasteurs/rabbins…) sont considérés comme des fonctionnaires. L’accord Lang-Couplet de 1993 les définit comme des fonctionnaires de catégorie A et bénéficiaires des Assedic en cas de chômage.

En outre, comme déjà mentionné plus haut, l’État nomme ses évêques. C’est le seul État qui nomme ses évêques sur une partie de son territoire. Comment cela se passe ? Le nonce apostolique, nom donné à l’ambassadeur du Saint Siège, propose 3 évêques possibles à la Congrégation pour les évêques du Saint-Siège. Ce dernier propose un candidat au Pape qui choisit oui ou non. En cas d’acceptation, l’Élysée en est alors informé par le biais du nonce. Celui-ci choisit alors de le nommer ou pas. Si c’est le cas, il publie un décret tenu secret et informe le Saint-Siège. Le Pape fait alors une bulle (document pontifical) pour l’investiture canonique de l’évêque nommé. L’Élysée en est averti puis les deux protagonistes se mettent d’accord sur une date. Et à la date convenue, la nomination est publiée simultanément au Journal Officiel et l'Osservatore Romano.

Mais outre les institutions et leurs ministres du culte, c’est aussi l’Éducation qui change grandement. En effet, il y a dès l’école primaire des cours religieux. Cependant, on a quand même le choix, par mot des parents, d’en être dispensé, on a alors droit à des cours de morale. Les cours religieux se poursuivent jusqu’à collège. Il y a également des facultés de théologie avec un diplôme d’État de théologien visant à former les professeurs entre autre.

Donc voilà, en France métropolitaine, la laïcité n’est pas de partout. L’Alsace-Moselle est sans doute l’exception qui confirme la règle. Mais je tenais à le souligner car peu de gens le savent. Et parmi ceux qui le savent, beaucoup pensent que cela vient de l’Allemagne alors que c’est bien Napoléon qui l’a fait. Évidemment, aujourd’hui, son objectif n’est plus de contrôler l’Église, c’est juste qu’on ne s’en soucie guère et que les Églises veulent garder leurs acquis sociaux.

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